De l’ ADN exploitable dans l’affaire Omar Raddad

De nouveaux prélèvements ont permis de retrouver des traces d’ ADN exploitables sur les lieux du meurtre. Un espoir pour Omar Raddad de prouver l’innocence qu’il a toujours clamée.

Jeudi 5 novembre 2015, le parquet de Nice a annoncé que des traces d’ADN qualifiées d’exploitables ont été retrouvées sur les lieux du meurtre de Mme Marshall retrouvé assassinée dans la cave de sa villa en 1991 où travaillait alors Omar Raddad comme jardinier.

Le parquet de Nice précise que ces traces d’ADN n’ont pas encore été exploitées. Mais elles le seront dans un avenir proche. Il tempère également cette nouvelle en déclarant qu’il convient de rester extrêmement prudent. Notamment quant aux identités des personnes qui pourront être révélées à l’issu des résultats de ces tests ADN.

Ces traces d’ADN ont été retrouvées suite à de nouvelles analyses sur les portes où ont été retrouvées les célèbres inscriptions « Omar m’a tuer ». Sylvie Noachovitch, l’avocat d’Omar Raddad, a fait valoir la loi du 20 juin 2014. Celle-ci assouplie les règles pour obtenir la révision d’un procès afin d’obtenir la réalisation de nouveaux prélèvements.

  • Un nouvel espoir pour Omar Raddad

traces ADN retrouvées dans l'affaire Omar Raddad
Omar Raddad en 2011
Crédit : Yann Caradec

Omar Raddad avait été condamné en 1994 à 18 ans de réclusion criminelle pour le meurtre de Ghislaine Marshall, ce qui apparu pour beaucoup comme une erreur judiciaire étant donné la faiblesses des charges et des preuves contre le jardinier.

Omar Raddad bénéficia d’une grâce présidentielle en 1998. Il est libre depuis cette date mais est toujours officiellement coupable de l’assassinat de son ancienne patronne alors qu’il n’a cessé de clamer son innocence. Il poursuit un long combat pour que soit enfin prouvée et reconnue son innocence dans ce dossier. Les espoirs qu’il fonde dans cette analyse des nouvelles traces d’ADN sont grands.

En 2002, des traces ADN qui n’étaient pas celles d’Omar Raddad avaient déjà été retrouvées sur les lieux du crime. Mais la Justice avait refusé d’envisager une révision de la culpabilité de l’ancien jardinier. Elle justifiait sa décision par le fait qu’il était impossible de déterminer quand ces traces ADN avaient été déposées sur les lieux.

Première semaine du procès de Daniel Legrand dans l’affaire d’Outreau

Retour sur la première semaine d’audience dans le procès de Daniel Legrand fils en tant que mineur à l’époque de l’affaire d’Outreau.

Le nouveau procès de Daniel Legrand fils dans l’affaire d’Outreau a débuté le 19 mai à Rennes devant la cour d’assises pour mineurs de Rennes. Alors que la première semaine d’audience touche à sa fin, que faut-il retenir de ces premières journées de procès ?

Rappelons que Daniel Legrand fils avait été définitivement acquitté lors du verdict du procès en appel en 2005. Comme 13 des 17 personnes initialement condamnés pour des actes pédophiles dans l’affaire d’Outreau. Cependant, cet acquittement est officiel pour les faits reprochés à Daniel Legrand fils en tant que personne majeure.

Comme la justice le permet, il peut être jugé pour les mêmes faits en tant de mineur au moment des prétendus agissements. C’est bien ce jugement qui voit sa première semaine se dérouler devant la cour d’assises pour mineurs de Rennes en ce moment même.

  • 19 mai, l’audience est ouverte

première semaine du procès de Rennes
Rennes centre ville
Crédit : Baristarim

« Je m’appelle Daniel Legrand. Je suis né à Boulogne-sur-mer le 15 juillet 1981 ». Tels sont les premiers mots de l’accusé lors ce cette première journée. Trois des enfants Delay, Cherif, Dimitri et Jonathan se constituent partie civile. En cette première matinée seul Jonathan est présent, puis Dimitri apparaitra dans l’après-midi.

Alors que la matinée se termine par la présentation des faits par le président du tribunal, l’après-midi débute par l’interrogatoire de personnalité de Daniel Legrand Fils. Ce dernier évoque son enfance « Moi c’était football, football, football. J’ai même arrêté l’école à 16 ans pour me consacrer au football ». Puis son incarcération « je pleurais souvent, je comprenais pas ce qui m’arrivait ».

Puis viennent à la barre la mère et la sœur de Daniel Legrand Fils. La première évoquera sa vie de famille simple avant l’affaire d’Outreau. La seconde la situation de son frère « qui a sombré au fond du trou et on a du mal à le remonter. »

  •  20 mai, l’audition de Jonathan Delay

La deuxième journée d’audiences commence par la venue à la barre des deux policiers qui ont entendu les enfants au cours de l’enquête. Didier Wallet évoque le manque de moyen dont il disposait à l’époque. Mais surtout il précise qu’ « Aucun enfant ne reconnaît en photo, ni ne parle de Daniel Legrand ». Le deuxième policier déclare avoir peu de souvenirs de l’affaire. Il précise n’avoir pas non plus « fait d’acte concernant Daniel Legrand ».

Dans l’après-midi, arrive à la barre Johathan Delay, un des enfants victimes des pédophiles dans l’affaire d’Outreau. Johathan Delay a du mal à s’exprimer et tout le monde s’accorde sur la souffrance qu’il ressent. Quand le président lui demande « Daniel Legrand fait partie des gens qui ont abusé de vous ? » il répond « oui. Je sais qu’il était là ».

  • 21 mai, familles d’accueil, docteurs et Cherif Delay à la barre

La troisième journée commence par la venue à la barre de l’assistante familiale de Cherif Delay de 1988 à 2004. Elle indique de ce dernier a commencé à se confier quand « ses autres frères ont commencé à parler ». Mais qu’elle n’a « jamais entendu parlé du nom de Daniel Legrand » avant 2004.

Puis c’est au tour de l’assistante familiale qui a accueilli Dimitri et Dylan à partir de 2000. Quand Dimitri a commencé à évoquer ce qu’on lui faisait subir, il établit une liste de 10 noms dans laquelle n’apparait pas Daniel Legrand. L’assistante familiale explique qu’elle « croyait Dimitri avec prudence ». Elle « lui tendait des pièges » pour savoir s’il mentait. Puis dans une deuxième liste apparait le nom de Daniel Legrand.

L’après-midi commence par une visio conférence avec des docteurs ayant examinés les enfants Delay. Le docteur Dickes ayant examiné Dimitri en 1999 déclare « j’ai été le seul a avoir pu constater dans les délais qu’il n’y avait rien ». Puis le docteur Bouvy indique avoir examiné tous les enfants Delay à l’époque et n’avoir relever que des examens normaux sauf pour Jonathan, avec pour ce dernier des éléments compatibles avec des actes de pénétration.

L’assistante familiale de Jonathan arrive à son tour à la barre. Elle aussi évoque les souffrances qu’elle lisait dans le regard de l’enfant. « Un enfant de cet âge là ne pouvait pas inventer des choses pareilles, c’était pas possible. »

Puis arrive enfin Cherif Delay à la barre, l’ainé des quatre frères, âgé aujourd’hui de 25 ans. Rapidement il indique au sujet de Daniel Legrand « cette personne qui est là aujourd’hui je la reconnais. » L’audition est difficile pour Cherif Delay « par rapport au stress et à des souvenirs qui sont lointains ».

  • 22 mai, l’audition du Juge Burgaud

La journée débute par l’audition de l’assistante sociale et référente des familles d’accueil des enfants Delay. « Après les vacances de Toussaint 2000, vient le premier signalement ». Elle évoque la mère des enfants, Myriam Badaoui, qui « pouvait nous dire que ses enfants étaient en danger puis remuer ciel et terre pour qu’ils rentrent ». Elle enchaine en indiquant que « Myriam Badaoui avait l’art de semer le trouble par cette attitude ambivalente. Je ne l’ai pas sentie sincère. »

S’en suit les interventions d’Henri Villeneuve, chef de service éducatif du conseil général. Puis Eric Tamion, juge pour enfants qui reconnait que les parents Delay n’ont été placés en garde à vue que plusieurs semaines après que leurs enfants les aient accusés. Ceci aurait pu laisser le temps aux parents de faire disparaitre certains éléments matériels.

L’après-midi voit défiler à la barre Patrice Duval, l’ancien greffier du juge Burgaud puis le juge Burgaud lui-même. Le greffier est peu loquace, répondant plusieurs fois par des « je n’ai pas le souvenir » ou similaire.

Le juge Burgaud revient longuement sur l’instruction qu’il a mené lors de l’affaire d’Outreau. Il indique que « à partir de juin 2001, de nouveaux noms apparaissent dont un certain Dany Legrand lié à la Belgique ». Il reconnait une instruction difficile. « La difficulté était de savoir ce qui pouvait être établi et ce qui pouvait être de fausses accusations » avec une « autre difficulté et pas des moindres, c’était une instruction sous pression des médias. »  Sur la question de l’apparition du nom de Daniel Legrand dans le dossier, il précise « Je ne soufflais aucun nom à Myriam Badaoui, je n’avais aucun intérêt à le faire. »

Fin de la première semaine d’audience

Argument surprenant de l’État pour ne pas indemniser El Jabri

L’état avance qu’il n’y a pas de preuve de l’emprisonnement d’Abderrahim El Jabri pour justifier son refus de l’indemniser.

Situation ubuesque à la Cour d’appel de Nîmes. Abderrahim El Jabri qui s’est battu pendant des années pour prouver son innocence dans le meurtre d’un trafiquant de drogue en 1997, doit à présent prouver …. son incarcération !

Abderrahim El Jabri et Abdelkader Azzimani ont bénéficié d’un acquittement définitif en 2013. Ceci après une erreur judiciaire qui les aura conduit à passer 13 ans de leur vie pour un crime qu’il n’avait pas commis. Les deux hommes ont donc déposé des requêtes pour obtenir des réparations financières auprès de la cour d’appel de Nîmes. Ils demandent ainsi, chacun à l’État, trois millions d’euros d’indemnités.

  • « Nier la réalité des 13 ans d’incarcération de M.El Jabri, c’est ridicule et insultant » selon l’avocat de M. El Jabri

Abderrahim El Jabri
Abderrahim El Jabri

L’avocat de l’agent judiciaire du Trésor, le représentant de l’état chargé des procédures d’indemnisation, propose 250 000 d’euros en guise d’indemnisation pour Abdelkader Azzimani. Mais il propose de ne rien verser à Abderrahim El Jabri alors que les cas des 2 hommes sont similaires.

Pour quel motif ? On peut trouver les arguments de l’avocat de l’État dans les conclusions présentées au tribunal. «Il ressort des démarches effectuées (…) que la cote “détention” n’a pas été numérisée et n’est donc pas disponible pour la consultation». Cela signifie en clair qu’il n’y a pas de trace de l’incarcération d’Abderrahim El Jabri dans les registres de l’État.

Me Darrigade, l’avocat du plaignant s’insurge contre cet argument purement administratif. Puis il précise qu’ «Il y a des arrêts de condamnation successifs, un acquittement, des recours en révision, qui reprennent tous la période de détention.»

Me Darrigade ne mâche pas ses mots à l’encontre du représentant de l’État. « Nier la réalité des 13 ans d’incarcération de M.El Jabri, c’est ridicule et insultant. On ne sait pas à quoi l’avocat du Trésor a voulu jouer… On pourrait en rigoler, mais vu la gravité de ce que mon client a vécu, c’est la colère qui domine. »

L’avocat de l’ancien prisonnier se veut pour autant confiant. «Le président de la Cour d’appel ne marchera pas dans cette combine».